Captures et réduction en esclavage de populations nordiques par les Barbaresques
Texte très documenté de Manuel Gomez (Dreuz et Riposte laïque). Il est né en Algérie et Albert Camus le fit entrer dans le Quotidien Alger-Républicain, puis à la Dépêche d’Algérie. Il poursuit sa carrière en France en 1962 comme chef de rubrique du Quotidien L’Aurore.
On peut lire aussi le livre très complet de Gilles Milton : « Captifs en Barbarie » L’histoire extraordinaire des esclaves européens en terre d’Islam. (Petite bibliothèque Payot). ET.

Il n’est jamais trop tard pour apprendre et je viens d’en faire l’expérience : j’ignorais que les pirates barbaresques avaient poussé leurs incursions bien au-delà des îles Britanniques, jusque sur les côtes du Danemark, de la Norvège et même de l’Islande.
Trois navires pirates turcs se sont rendus jusqu’en Islande, en 1627, et, après des razzias, massacres, viols et vols, ont emporté environ 400 islandais, femmes et hommes, qui seront vendus comme esclaves sur la place du marché d’Alger, dès leur arrivée.
Nous apprenons, grâce à l’enquête de l’auteure islandaise Guoriour Simonardottir, qu’en l’an 1636, le représentant du roi du Danemark a pu payer les rançons et, après de longs marchandages, libérer, afin d’être rapatriés vers leur pays d’origine, 28 femmes islandaises et 22 hommes danois, norvégiens et islandais.
La facture payée pour ces rançons nous indique :
— Le 9 juin 1636, Ornia Jondochter, 100 Riskdals plus 60 pour le voyage, soit 160 Riskdals.
— Le 11 juin 1636, Abdraham Molet, 215 Riskdals plus 63 pour le voyage, soit 278 Riskdals.
— Le 12 juin 1636, Gudridur Simonsdochter, 180 Riskdals plus 62 pour le voyage, soit 242 Riskdals.
Il est impossible de convertir ces sommes en « Riksdals » en « Euros » actuels mais, il est indiqué dans les commentaires, que ce furent des sommes « assez élevées ».
Donc, après six années d’esclavages dans la région d’Alger, et comme cette pratique se reproduisait chaque année, soit par les représentants des rois de divers pays européens, soit par les chevaliers de Malte, les esclaves pouvaient être « revendus », grâce aux paiements de rançons et avec un bénéfice important pour leurs propriétaires.
Il est intéressant de noter que, à l’époque donc de l’occupation ottomane, de toute cette côte méditerranéenne du Maghreb, il existait tout de même, lors du 17ᵉ siècle, une église, à Alger capitale, dont les prêtres étaient autorisés d’exercer leur culte catholique et recevoir à deux dates principales, Pâques et Noël, certains esclaves de religion catholique qui, après plusieurs années d’esclavage et ayant acquis la confiance de leurs maîtres, pouvaient s’y rendre, accompagnés et surveillés par un garde.
Près de quatre siècles plus tard, les chrétiens, ce qu’il en reste, des pays ottomans (la Turquie) et du Maghreb, n’ont ni le droit, ni l’endroit, pour se recueillir et l’on peut affirmer que les frères Barberousse étaient bien plus tolérants que l’actuel dictateur turc Erdogan qui, sans la moindre protestation du Pape actuel, soi-disant défenseur de la chrétienté, a transformé en mosquée « Sainte-Sophie ».
Note d’information
Simon le Danseur alias Raïs Dali, un renégat hollandais, divulgue aux barbaresques de la Régence d’Alger les techniques de construction de vaisseaux capables d’évoluer dans l’océan Atlantique.
An 1604 :
Raïs Dali lance les premières attaques contre les galions espagnols revenant d’Amérique, entre les Açores et le Cap vert.
An 1627 :
Les barbaresques sous le commandement du renégat Jan Janszoon débarquent à Reykjavík en Islande le 16 juillet. Ils pillent et capturent plus de 200 personnes qui deviendront des esclaves.
An 1631 :
Jan Janszoon et les barbaresques récidivent leur poussée vers le nord, mais cette fois en Irlande et en Angleterre.
Je ne sais pas si Richelieu a réagi, mais les Chevaliers de Malte (fils des Frères de l’Hôpital) rachetaient sous Louis XIV, sur les marchés aux esclaves – dont Candie (La Crète)- les chrétiens de toutes nationalités : Miche
C’est sous Richelieu justement qu’on constate, pour la première fois, la prise de conscience par la France de la nécessité de disposer d’une Marine nationale (de guerre comme de commerce) puissante.
Les premiers efforts en ce sens furent lancés par Richelieu en 1624 dès son accession au Conseil du Roy et 18 navires commandés en Hollande en 1626, mais il faudra attendre le milieu des années 1630 que la France dispose d’une flotte conséquente. Il faut dire que les ingénieurs, les ouvriers spécialisés et les marins ne se trouvent pas sous les pas d’un cheval.
Il aura fallu « importer » des ingénieurs hollandais pour former nos propres ingénieurs, du fer suédois pour l’artillerie et du bois de la baltique.
Sans compter la mise en place de ports militaires, préfigurant les Arsenaux, dont les infrastructures étaient inexistantes ou presque en 1624.
Autrement dit la France n’avait en aucun cas les moyens d’agir contre les Barbaresques avant 1630 environ. Et même alors, son attention était tournée contre l’Espagne des Habsbourg.
En Islande, malgré une réforme récente, les noms sont historiquement formés du prénom de la mère suivi de « dotir » quand il s’agit d’une fille et du prénom du père suivi de « son » quand il s’agit d’un garçon.
Donc Goriour fille de Simonar s’appellera Goriour Simonardottir.
Si Goriour avait une fille nommée Anik, elle s’appellerait Anik Goriourdotir
Donc Olaf fils de Alaan s’appellera Olaf Alaanson. ETC.
Celui qui avait mis en lumière le sort des chrétiens esclaves des barbaresques, et est intervenu à la cour de France sans succès, c’est le père Vincent de Paul (voir article Dreuz). CB-B.
DW