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L’extension des Protocoles de la lutte aux États-Unis (Alexandre Feigenbaum)

Cet article est en quatre parties écrites par Alexandre Feigenbaum, accessibles sur ce site. Les parties sont indépendantes, mais peuvent être de préférence lues dns cet ordre :
De nos 400 ans d’expérience de l’esclavage, nous savons que le sionisme n’est pas du racisme
L’extension des Protocoles de la lutte aux États-Unis
De Ferguson à la Palestine, des trous dans la banquise
Comment l’extrême gauche est devenue islamo-compatible

Des mythes anti-israéliens et antijuifs ont été formulés conjointement par des suprémacistes blancs, par des suprémacistes noirs, des suprémacistes islamiques, des antisionistes soviétiques … depuis les années 1950. C’est une véritable remise à jour des « Protocoles des Sages de Sion », qui est aujourd’hui propagée sur les réseaux sociaux. C’est un véritable super marché de thèmes racistes où les antiracistes sélectifs d’extrême droite et d’extrême gauche pêchent les slogans qui les intéressent. Ces thèmes ont été présentés lors de la vidéo-conférence du 24 avril de Dhimmi Watch, sur les esclavages occultés. L’illustration de cet article est un post sur Facebook de l’Imam australien, Mohamad Tawhidi, un imam pour la paix et qui refuse les mythes anti-israéliens.

Le mythe des Juifs esclavagistes et Robert Brock

Le personnage central est ici Robert Brock,[1] un suprématiste noir qui haïssait tellement les Juifs qu’il s’était compromis avec « Christian Identity »,[2] une organisation proche du Ku Klux Klan.[3] Brock écrivit « who brought the slaves to America ? » (Qui a amené les esclaves en Amérique ?), publié par Walter White. Henri Pasternak explique :

« « Qui a amené les esclaves en Amérique » ? Les Juifs, bien sûr, l’ »ennemi commun » des Blancs et des Noirs. Ils sont coupables à la fois de l’existence du problème noir aux États-Unis (en tant qu’esclavagistes présumés) et des désordres causés par ce problème (en tant que militants des droits civiques) »

« Who brought the slaves », une brochure de 32 pages, a connu un faible succès, mais les thèses qui y sont développées ont été reprises par la revue “Liberty Bell” (néo-nazie), par “the Crusader” (KKK) et par Nation of Islam, puis elles ont connu un succès planétaire, décrit par Gilles Karmasyn[4] :

« Brock est resté totalement marginal. Pourtant, l’opuscule antisémite qu’il rédige à la fin des années 1960 est bien à l’origine, quand bien même à l’issue d’un parcours sinueux, de l’une des principales nouvelles accusations antisémites de portée mondiale de la fin du 20ème siècle et du début du 21ème, popularisée en France par Dieudonné. Il ne faut jamais négliger la nocivité des fanatiques de la haine. »

Nation of Islam

Le mythe de la perversité des Juifs a été repris largement par Nation of Islam (NoI) et ses leaders Wallace Fard Muhammad (le fondateur de NoI en 1930), puis Elijah Muhammad et Louis Farrakhan. NoI se pose en mouvement révolutionnaire d’inspiration islamique, et reprend l’antijudaïsme et l’antichristianisme des Frères musulmans. Les thèmes se sont développées au cours du 20ème siècle : les Juifs auraient été responsables de la traite des esclaves africains et de l’esclavage en général ; des médecins juifs auraient injecté aux Noirs le virus du SIDA ; l’islam serait la religion des Noirs ; le christianisme serait la religion des esclavagistes et de l’esclavage ; les Noirs doivent refuser la soumission aux « démons blancs », représentant du mal sur la Terre ; les Blancs sont issus d’une manipulation génétique par un savant noir fou. [5]

Selon l’Anti Defamation League (ADL), NoI accuse les Juifs d’être responsables de l’esclavage, de l’exploitation économique du travail noir, de la vente d’alcool et de drogues dans leurs communautés et de la domination injuste de l’économie. Pour Farrakhan,[6] l’ADL « utilise le terme « antisémitisme » pour étouffer toute critique du sionisme et de la politique sioniste de l’État d’Israël et aussi d’étouffer toute critique légitime du comportement errant de certains Juifs envers la population non juive de la terre. »

Étonnamment, en France, des thèmes de Nation of Islam sont véhiculés par des artistes qui jouissent d’un vrai succès à cause de ces thèmes. On connait l’humoriste Dieudonné (voir l’article sur wikipedia). En 2021, le Festival de Cannes a offert sa présidence à Spike Lee, présenté comme un « antiraciste » par la presse française. Il faut dorénavant distinguer les antiracistes sélectifs et les universalistes.

Les mythes de l’apartheid israélien et du génocide que subiraient les Palestiniens.

Le régime d’apartheid en Afrique du Sud a provoqué la légitime indignation des défenseurs des Droits de l’Homme y compris, bien sûr, des Afro-américains. Mais dans les années 1980, ceux qui protestaient contre l’apartheid en Afrique du Sud protestaient également contre les États-Unis et Israël qui, avec la France, vendaient des armes au pouvoir sud-africain. En 1991, lorsque l’apartheid fut aboli en Afrique du Sud, l’accusation « d’apartheid » se déporta de l’Afrique du Sud vers Israël. Uniquement sur Israël.

Les mythes de « l’apartheid » israélien et du « génocide palestinien » ont été démontés par Ben Dror Yemini, dans : « l’Industrie du Mensonge. »[7],[8] Chiffres à l’appui, Yemini démontre que ce « génocide » n’est qu’une invention de la propagande arabe : de tous les conflits impliquant des Musulmans (Israël, Liban, Yémen, Tchétchénie, Syrie, Somalie, Indonésie, Iran, Algérie, Irak, Bengladesh, Soudan, Afghanistan), le conflit israélo-palestinien est, de loin, le moins meurtrier : « Il est difficile de trouver un conflit national violent qui ait fait aussi peu de victimes (p. 161). La population des Arabes palestiniens a été multipliée par près de 10 entre 1948 et 2021, ce qui est l’inverse d’un génocide ».

De même, l’accusation d’ »apartheid » n’est que propagande : rappelons simplement que des Arabes israéliens ont des responsabilités importantes dans l’armée, les hôpitaux, la justice… Abdel Rahman Zuabi, Salim Jubran et George Karra ont fait partie des 15 Juges de la Cour suprême d’Israël…

Yemini montre que c’est dans des pays arabes qu’il y a de la ségrégation envers les Arabes palestiniens : Par exemple, en 1959, la Ligue Arabe a rejeté les demandes palestiniennes d’acquérir la citoyenneté d’états arabes. Le Fatah lui-même a regretté que « la persécution des Palestiniens dans les pays arabes a été un facteur majeur pour les confiner dans une situation empêchant toute assimilation » (p. 206).

Pourtant, la fausse accusation d’ »apartheid israélien » est relayée même par des ONG. Agnès Callamard, la nouvelle responsable d’Amnesty International, a déclaré en avril 2021 que Shimon Peres aurait reconnu l’assassinat de Yasser Arafat par Israël (!). Callamard s’est excusée d’avoir diffusé cette fausse information. Mais cet épisode révèle que des personnes dont la fonction requiert pourtant une stricte impartialité sont contaminées par une propagande anti-israélienne, pourtant délirante.

Le mythe du colonialisme israélien “du Nil à l’Euphrate », la contribution islamo-nazie

La première mention du colonialisme israélien dans une enceinte internationale remonte à la Conférence de Bandoeng en 1952. Cette conférence regroupait pour la première fois des pays récemment décolonisés, désireux de mener leur politique indépendante, alignée ni sur les États-Unis, ni sur l’URSS. Un nazi arabe, Amin al Husseini, ex-mufti de Jérusalem, participa à la Conférence en tant que représentant du Yémen, où il n’avait jamais mis les pieds. Selon l’historien Léon Poliakov,[9]

« A Bandung, al Husseini « révéla » les « intentions sionistes » : la formation d’un grand empire colonial du Nil à l’Euphrate, incluant la Syrie, la Jordanie, le Sinaï, le delta égyptien, l’Irak, le Nord Hedjaz, et donc Médine. Ainsi édifiés, tous les participants basculèrent du côté arabe, à l’exception de la Birmanie. » 

Al Husseini connaissait l’art du mensonge : lui-même nazi convaincu et passionné, il recueillait au Caire des dizaines de nazis allemands en fuite, dont Johan von Leers, proche collaborateur de Goebbels.[10] Ensemble, ils reprirent le travail de propagande du Reich, à l’adresse, cette fois, du monde arabe … et des pays décolonisés. Le nazisme a été vaincu militairement en Europe, Al Husseini lui a offert une nouvelle vie à l’ombre de l’islam radical et vers les pays arabes.

Le mythe « du Nil à l’Euphrate » fut repris par la propagande soviétique dans la guerre froide. Ainsi, en 1969, en URSS, Iouri Ivanov publiait « Attention, sionisme », où il mettait dans la bouche de Ben Gourion les propos suivants, bien sûr totalement faux : « La nation israélienne doit s’étendre du Nil à l’Euphrate. »

En réalité, c’est la propagande arabe qui ne se cache même plus pour montrer des cartes de « Palestine du Jourdain à la mer », en faisant simplement disparaître Israël. En témoignent de nombreux exemples, comme l’écusson arboré par Yasser Arafat, ou la couverture du dernier livre de Noura Erakat.[11]

Le Hamas est actuellement la principale organisation islamo-nazie non étatique. L’article 32 de sa charte se réfère explicitement aux « Protocoles de Sages de Sion », un ouvrage fort apprécié des nazis. Régulièrement, lorsqu’il attaque Israël, l’extrême gauche défile pour dénoncer … Israël qui ne se laisse pas bombarder tranquillement.

L’islamo-nazisme est apparu au grand jour en septembre 2001, à Durban, dans la conférence internationale des ONG soi-disant « contre le racisme » : une affiche anti-israélienne à l’effigie d’Hitler était placardée dans l’enceinte de la conférence. L’affiche faisait dire à Hitler : « Si j’avais gagné, il n’y aurait pas eu de sang palestinien versé ». Selon l’association antiraciste ICARE, cette affiche a été réalisée par Yousouf Deedat, secrétaire général de l’Islamic Propagation Center en Afrique du Sud, financé par Ben Laden.[12] Les participants de la conférence, pourtant « antiracistes », ne s’étaient pas formalisés de cette affiche.

Le mythes des infanticides israéliens

Le 2 octobre 2000, France 2 diffusait dans son journal de 20h un film montrant la mort en direct d’un enfant, Mohamed Al Dura. Le commentaire indiquait que les balles étaient israéliennes. L’onde de choc dans le monde entier a été si importante que lorsqu’il est devenu évident qu’il s’agissait d’une fiction, d’un film de propagande, la plupart des téléspectateurs ont refusé de le croire. Des pays arabes ont imprimé des timbres à l’effigie de cet enfant. Le mythe moyenâgeux des Juifs « tueurs d’enfants » a été réactivé.[13] La presse diffuse, même en 2021, même en France, le narratif du Hamas, prétendant que les Israéliens tueraient délibérément des enfants arabes. Les mythes ont la vie dure. Al Qaida a assassiné le journaliste américain Daniel Pearl devant un écran diffusant en boucle le film d’Al Dura. A l’Université de Vassar (NY), dans le cursus « Africana Studies », une professeure enseigne comment les Israéliens feraient des expériences médicales sur des enfants arabes palestiniens.[14]

Le mythe de l’islam, refuge contre l’esclavage

Dans « Racée », Rachel Khan rappelle que « l’Afrique est devenue musulmane par l’esclavagisme et la domination arabe. » Elle évoque ce propos de Romain Gary :

« Lorsque Malcolm X écrit, à propos des Blancs : « comment pourrais-je aimer l’homme qui a violé ma mère, tué mon père et réduit mes ancêtres en esclavage ». C’est pourtant exactement ce qu’il fait lorsqu’il se jette dans les bras d’un prophète. »[15]

Et en effet, comment l’islam, qui a colonisé l’Afrique, asservi les Africains de manière cruelle, peut-il aujourd’hui apparaître comme un refuge contre l’esclavage ? On trouve l’idée, bien sûr, chez Nation of Islam. Mais on la rencontre aussi chez l’historien Ibrahima Thioub,[16] doyen de l’Université de Dakar. Selon Thioub, l’islam est devenu un refuge contre la traite atlantique dès le 17ème siècle, dans des actions d‘autodéfense menées par des Africains. Ainsi, dans le mouvement Poub Naan en Mauritanie et au Sénégal de 1673 à 1677, des chefs musulmans avaient organisé la population pour se défendre contre les esclavagistes et contre l’alcool, « le carburant de la traite en échange d’esclaves ». Selon Thioub, ce mouvement a eu une « influence considérable ».

Conclusion

Les suprématistes (blancs ou noirs), les néo-nazis, et, plus tard les antisionistes soviétiques ont formulé des discours anti-israéliens et antijuifs aux USA. Leurs ouvrages sont oubliés, mais les thèmes sont repris par des artistes dont les slogans ont contaminé les opinions publiques. Le mouvement « woke » essentiellement blanc, développe la Critical Race Theory

L’Affaire Legagneux (1972) permet de mesurer le chemin parcouru par les thèmes antijuifs et anti-israéliens. Legagneux, député communiste, avait signé (sans la lire) une tribune anti-israélienne du journal « URSS », diffusé par l’Ambassade d’URSS en France : « les Israéliens tuent les Arabes, c’est dans les règles de l’armée israélienne » etc. Legagneux fut vilipendé par la presse française, accusé d’avoir plagié les « Protocoles des Sages de Sion » : « on avait seulement substitué « sioniste » à « juif » ».[17] Près de 50 ans plus tard, ces mêmes fantasmes racistes sont scandés dans les rues de Paris par des manifestants qui se croient motivés par les droits de l’Homme. La presse française ne proteste plus….

L’affaire Legagneux révèla une autre rupture, qui avait déjà eu lieu dans le discours soviétique, celle-là : En 1948, l’URSS joua un rôle important pour la reconnaissance d’Israël par l’ONU. Voici les discours de Andreï Gromyko, représentant l’URSS à l’Assemblée Générale de l’ONU

Le 26 novembre 1947 : Les représentants des Etats arabes affirment que si l’on tient compte de l’histoire, le partage de la Palestine serait une injustice. Toutefois, on ne saurait se rallier à cette opinion et cela pour cette simple raison que, pendant une période historique fort longue, le Peuple Juif a eu des liens très étroits avec la Palestine.

Le 7 juillet 1948 : L’opinion publique mondiale a déjà̀ condamné les agissements de certains milieux arabes qui ont attaqué́ l’État juif et qui ont occupé́ le territoire réservé́ à l’État arabe en Palestine

Entretemps, dès 1952, Staline avait mis en route des campagnes antisionistes, qui allaient remettre en selle d’anciens nazis, comme Iouri Ivanov, cité plus haut, qui créèrent de la prose comme celle qu’on trouva dans la revue « URSS » en 1972.


[1] Henri Pasternak : La Machine à fabriquer des mythes : La nouvelle alliance entre les dénonciateurs des « esclavagistes juifs » et les négateurs de la Shoah (paru dans l’Arche, consulté sur https://phdn.org/antisem/noirs/allianceaveclesnegateurs-1999.html)

[2] Pasternak signale le parallélisme entre les croyances des sectes chrétiennes identitaires et de « Nation of Islam » : dans les deux cas, le message divin (biblique ou coranique) aurait été falsifié par les Juifs afin d’asseoir leur domination du monde, et les «vrais» héritiers (chrétiens ou noirs, respectivement) doivent éliminer ces usurpateurs afin de rétablir le royaume de Dieu sur terre.

[3] The Nizkor projet: Uncommon Ground: The Black African Holocaust Council and Other Links Between Black and White Extremists http://www.nizkor.com/hweb/orgs/american/adl/uncommon-ground/robert-brock.html

[4] Gilles Karmasyn : Robert L. Brock, un suprématiste noir, antisémite et négationniste, allié au Ku Klux Klan, https://phdn.org/antisem/noirs/robert-brock.html

[5] Nation of Islam, wikipedia https://fr.wikipedia.org/wiki/Nation_of_Islam

[6] https://en.wikipedia.org/wiki/History_of_antisemitism_in_the_United_States#African-American_community

[7] Ben Dror Yemini : L’industrie du Mensonge, les médias, le milieu universitaire et le conflit israélo-arabe, éditions de Passy, 2020

[8] The plight of Palestinian refugees: https://unpacked.education/video/refugees/

[9] Léon Poliakov, De Moscou à Beyrouth, la désinformation (1982), page 53

[10] Anne Vidalie, L’Express, 10 Août 2015 : l945, les derniers secrets: Le Caire et Damas, nids de nazis, https://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/1945-les-derniers-secrets-le-caire-et-damas-nids-de-nazis_1705501.html

[11] La couverture d’un livre de Noura Erekat, paru en 2019 montre une grande Palestine, de la mer au Jourdain, où il n’y a plus d’Israël : Justice for Some: Law and the Question of Palestine, (Justice pour quelques-uns : le droit et la question de la Palestine) https://agencemediapalestine.fr/blog/2019/04/28/la-palestine-le-droit-international-et-un-avenir-radicalement-juste/?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=noura_erakat_la_palestine_le_droit_international_et_un_avenir_radicalement_juste&utm_term=2019-04-30

[12] Bernice Dubois, in « recettes pour l’anéantissement du peuple juif », A. Feigenbaum, B. Dubois, K. Jbil, p. 97

[13] PA Taguieff, Le symbole al-Dura dans la guerre médiatique, de la fabrication à l’exploitation, PUF 2010, p. 281

[14] Ziva Dahl, ‘Intersectionality’ and the Bizarre World of Hating Israel, The Observer, 15 mars 2016

[15] Rachel Khan, Racée (2019), éditions de l’Observatoire, page 53

[16] L’Humanité, 23 juin 2008, entretien avec Ibrahima Thioub. Thioub participa à l’émission ‘les routes de l’esclavage’

[17] Le Monde, 28 mars 1973

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